contre le saccage des Pays du Buëch par les industriels du vent
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mercredi 4 mai 2022

Éolien, photovoltaïque, hydraulique :
Jean-Marie Bernard précise sa stratégie énergétique pour les Hautes-Alpes.

Conformément à un engagement pris lors de la campagne des dernières élections départementales, le Président des Hautes-Alpes, Jean-Marie Bernard a reçu les représentants de 3 associations de défense de l'environnement du Buëch :
Hélène Saletti, présidente de Défense de l'Environnement de la Vallée du Haut-Buëch
Roland Laprevote, président de l'Association pour la Préservation des Paysages Épinois
Jean-Philippe Salley, président de Haut-Buëch Nature

Nous l'en remercions.

Ci-après résumée la teneur d'une heure d’un rendez-vous très constructif.

Monsieur le Président, vous avez annoncé depuis plusieurs mois la création d'une SEM Énergie départementale. Pouvez-vous nous dire où en est ce projet et quel en est le but ?

Le dossier a pris un peu de retard à cause du Covid. La SEM va être créée probablement en juin prochain et sera opérationnelle pour la fin d'année. Outre le département des Hautes-Alpes, la SEM aura pour partenaire la Banque des Territoires. Je demanderai également à la chambre d'agriculture et à la chambre de commerce de nous rejoindre dans cette structure.
Le but est de permettre au département de devenir un opérateur dans le domaine des Énergies Renouvelables capable de maîtriser les projets de A jusqu'à Z sans la contrainte d'opérateurs privés dont les objectifs ne sont pas forcément ceux du département.

Justement, il y a pléthore d'intervenants sur le sujet des EnR (1) : chaque commune ou communauté de communes ayant été démarchée par un promoteur éolien ou photovoltaïque, veut créer sa structure ou faire son projet. Comment fonctionnerait la SEM départementale à l'égard de tous ces intervenants ?

Tout d'abord j'inviterai également le SyME 05 (2)  à nous rejoindre dans la SEM Énergie départementale. Ensuite, pour chaque projet de terrain nous créerons avec la collectivité une société de projet qui aura vocation à réunir tous les acteurs locaux autour de ce projet y compris les habitants s'ils le souhaitent.

Comme vous le savez la Loi fait obligation à toute collectivité qui monte un projet ayant une incidence environnementale d'enclencher dès la naissance du projet, la concertation avec les habitants. Ce n'est malheureusement pas souvent le cas.

Je le regrette. Le département dans la configuration que je vous ai indiquée aura pour ambition de mener à bien la concertation avec les citoyens concernés par chaque projet. C'est une obligation pour conduire ces opérations dans l'intérêt de tous. C'est le manque de concertation qui génère les difficultés et les oppositions.

Les oppositions proviennent également du fait que le gouvernement a toujours cherché à imposer à nos territoires ruraux ou de montagnes sa politique énergétique. Pour cela il a été déployé tout un arsenal très coercitif : la PPE (3) au niveau national, le SRADDET (4) au niveau régional, et les CTRTE (5) en local qui tous fixent des objectifs en terme de nombre d'éoliennes ou de surfaces de parcs photovoltaïques. Il n'est jamais tenu compte des réalités et des particularismes de chaque territoire. Pour preuve la ministre Pompili a ordonné aux préfets de définir des « zones favorables à l'éolien ». Nous sommes donc très inquiets sur la mise en pratique à « l'aveugle » car sans concertation, de ces directives d'autant que le Buëch est particulièrement visé pour accueillir des sites d'éoliennes industrielles.

Que peut faire le président du département pour défendre nos territoires ?

Le département est à la bonne échelle pour faire entendre la voix du territoire et être un interlocuteur écouté. Il a la compétence et l'expertise pour cela mais aussi une vision d'ensemble qui empêche de faire n'importe quoi ici ou là. Même si notre département est plutôt vertueux en terme énergétique, nous devons être solidaires des autres départements en PACA tout en préservant nos spécificités de département de montagne et l'importance d'un environnement préservé pour notre développement économique très dépendant du tourisme.

Comme je l'ai déjà dit, je suis opposé pour les Hautes-Alpes au développement de l'éolien industriel comme source d'énergie renouvelable. Je reste donc très vigilant sur le sujet.

Le mot « éolien » est tabou dans les débats que nous pouvons avoir avec nombre d'élus locaux même s'il reste présent dans divers documents officiels. Faute d'acceptabilité « sociale » pour ces aérogénérateurs géants, les élus se tournent maintenant massivement vers les parcs photovoltaïques, l'un n'empêchant pas l'autre, avec des risques élevés d'anthropisation des milieux naturels. Quelle est votre analyse de la situation ?

Le solaire comme l'hydraulique sont des gisements naturels de notre département. Nous devons les développer. Concernant le solaire nous devons prioritairement déployer notre programme sur l'équipement des toitures en limitant au maximum l'artificialisation des sols.

Nous sommes très inquiets sur la destruction des zones boisées que ces projets entraînent, la plupart du temps sans concertation avec les habitants et les usagers.

Là aussi le département sera vigilant sur les questions de déforestation. Encore une fois, le dialogue avec la population est une nécessité. Nous devons également protéger les zones agricoles et être attentifs sur la recrudescence de hangars uniquement bâtis pour leurs panneaux solaires en toiture et dont l'utilité agricole reste à prouver.

La commission européenne a maintenant une place prépondérante dans la politique énergétique des États membres d'autant que depuis des décennies nos gouvernements n'ont pas su y résister au nom de notre modèle spécifique de production électrique. La volonté de privatisation des barrages a fait grand bruit en particulier dans les départements alpins ? Qu'en est-il pour les Hautes Alpes ?

J'ai manifesté depuis le début mon hostilité à cette directive. Imagine-t-on le barrage de Serre -Ponçon aux mains d'un opérateur privé ? Qu'en serait-il de la sauvegarde du fragile équilibre que nous avons réussi à imposer entre production électrique, niveau de la retenue d'eau indispensable pour le développement de notre économie touristique locale et lâchers de quantités suffisantes pour l'irrigation ? Nous avons pris nos dispositions pour que le moment venu quand l'État fera un appel d'offre à la fin de la concession, une SEM hydraulique 05 puisse en être attributaire. Et pour cela, évidemment nous nous appuierons sur les compétences d’un opérateur professionnel (EDF, par exemple). 

(1) Énergies Renouvelables
(2) le Syndicat Mixte d'Électrification 05 devenu SyMÉnergie 05 s'appelle maintenant Territoire d'Énergie
(3) Programmation Pluriannuelle de l'Énergie
(4) Schéma Régional d'Aménagement de Développement Durable et d'Égalité des Territoires
(5) Contrat Territorial de Relance et de Transition Écologique

Hélène Saletti, Jean-Philippe Salley, Roland Laprevote, 
Jean-Marie Bernard le 28/04/2022 - photo Olivier Buteux

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